TOIT EN LAVE


DESCRIPTION
Matériau de construction :

En Bourgogne, on entend par « laves » des pierres plates utilisées traditionnellement en couverture de bâtiments. De nature sédimentaire -non volcanique- ces pierres sont sélectionnées pour leur qualité non gélive. La pierre calcaire était très présente sur sur les assises calcaires orientales du bassin parisien, en Bourgogne, Champagne, Franche-Comté et Lorraine. Les lavières, ou carrières d’extraction sont rendues visibles grâce au gel qui provoque un délitage naturel en surface du sol.

Léproserie de Meursault (21)

Nature des laves :

Dans le centre comme dans le sud-ouest de la France, le calcaire ou le grès sont très utilisés pour être transformés en laves ensuite employées dans la construction de toitures. Des roches de nature métamorphique sont quant à elles travaillées dans le même but, le granite, le calschiste ou l’orthogneiss. On trouve notamment le grès à Voltzia sous forme d’affleurement sur de nombreux plateux. En Cote d’Or et donc à Dijon, on rencontre essentielle des calcaires à Entroques qui sont également d’origine fossile. Ce type de lauzes pèse aisément 700kg par m².

Utilisation pratique :
Les lauzes bourguignonnes sont d’excellents isolants et présentent une grande résistance aux intempéries, la pluie, le froid. Aux abords de zones montagneuses et montées en couverture, elles permettent un amoindrissement des écarts saisonniers de températures et protègent de l’humidité. D’une grande résistance physique, elle ne craignent pas le poids d’un manteau neigeux. Il est capitale de bien choisir les laves. Elles doivent être saines et seiches pour éliminer les risques d’affleurement et de pourriture. D’entretien facile, l’ancien toit de lauze de maisons de pays est un élément de place dans le patrimoine du village.

Ferme à Verges (39)

 

ASPECTS TECHNIQUES
Le savoir-faire du couvreur:
Un métier avant tout demandant une grande précision, une excellente capacité à visualiser les volumes. Le lavier imagine la structure finale dans son ensemble, appuyé sur une patience sans faille. On parle du « savoir sentir » du métier. Les compétences requises regroupent celles des charpentiers, des couvreurs, des maçons, et bien sur des tailleurs de pierre. L’amour pour ce travail est certainement la principale qualité des poseurs de laves. En effet, ce dernier très dur et extrêmement physique implique un dévouement complet. Parfois effectué dans des conditions climatiques pénibles et, le temps de pose des pierres est d’une journée par m². La tâche est donc fastidieuse. Il utilise des outils qui ont très peu évolué dans l’histoire, simplement ce sont adaptés aux temps modernes. Hormis la perceuse motorisée, le marteau à laves et le gabarit sont les principaux alliés de ces artisans d’exception.

La construction d’un toit en lave :

Les lauzes sont utilisées en rangées qui doivent se recouvrir sur deux tiers de leur surface. Les lauzes du rang supérieur bloquent celles du rang en aval. Les pierres sont disposées de manière à former un angle de 15° avec le plan de la charpente de bois. Les laves viennent en appui sur une charpente en bois de chêne robuste conçue de façon traditionnelle. La pente du toit est supérieure à 45° pour une répartition optimale de la charge entre le mur gouttereau et la charpente. Plus cette pente est importante, plus le poids supporté par la charpente est faible. Parfaitement imperméable, la structure, pourtant dépourvue d’enduit ou de mortier, ne craint pas les infiltrations.

 

La pose des toit de laves :

La réalisation de la couverture est initiée pas la pose à plat d’un lit de laves, sur les lattes de chênes supérieures de la toiture. Il s’agit du doli qui prévient du basculement des laves de couverture vers l’intérieur de l’habitation. Elles permettent également un meilleur ajustement des laves du dessus. Puis les laves de couverture viennent s’appuyer presque horizontalement sur le plan incliné. Chaque lave supérieure recouvre celle en aval d’au moins 4cm, la légère pente diminue en s’approchant du faîtage. Les pierres sont, pour y parvenir, calées par des chutes appelées millons. Ce calage empêche aussi la remontée d’eau par capillarité dans la structure. Les laves plus volumineuses et lourdes sont disposées dans les parties basses. La pose de l’ensemble des laves d’un toit s’effectue rang par rang.

 

 

UN PATRIMOINE HISTORIQUE
Bénéfices esthétiques :
La lave de Bourgogne est un matériau noble. Robustes et faites pour durer dans le temps, les toitures de lauzes présentent un caractère régional et donnent une vraie identité aux bâtisses qu’elles couvrent.

 

Un métier valorisé :
La couverture d’un toit en lauzes est un savoir-faire répertorié pour la première fois récemment en Dordogne à l’inventaire du patrimoine culturel immatériel en France. Néanmoins, ce métier devenu très confidentiel et demandant une expertise unique bénéficie d’une image gratifiante. En effet, ces quinze dernières années, la moitié des toitures en pierre de Bourgogne a disparu et seules quelques personnes sont encore capables de construire ou de restaurer des couvertures en laves. Les laviers mettent de nos jours leur technique au service de la rénovation et sont donc gardiens d’une certaine identité régionale. Ce métier de précision qui requiert près de dix ans de pratique et qui se perd, comme de nombreux métiers artisanaux spécialisés devient donc apprécié de tous. Après des années d’apprentissage, bien souvent les artisans (ou artistes) reçoivent une réelle consécration en devenant comme leurs maîtres des Compagnons.

 

La lave de bourgogne dans l’histoire :

La pose de couvertures en lauzes est une pratique ancestrale. En effet, il y a des siècles, dans les forets bordant les villages de ces régions on ouvrait régulièrement des lavières pour les besoins locaux en matériau de couverture. Certains secteurs entiers de ces zones sont vierges de toits en tuiles plates, mais présentent des toitures en tuiles mécaniques. Il apparaît probable que ces dernières aient supplanté directement la pierre à la fin du XIXe siècle. De nombreux édifices prestigieux aujourd’hui monuments historiques, des chateaux, des églises ou encore des bâtiments officiels sont abrités sous un toit de laves depuis des siècles. On rencontre également certains villages dans lesquels près de la moitié des maisons reçoit une telle toiture. Enfin, des fermes ainsi que leurs dépendances sont couverts de lauzes. Les chalots servant de greniers à grain étaient véritables coffres forts aux saisons froides dans certaines régions. De nos jours, les laves utilisées sont des matériaux de récupération pour des raisons de rareté. L’essentiel de ce type de matériau est destiné à la restauration de l’ancien. L’exploitation des lauzières est quasi inexistante de nos jours. Le coût très élevée d’une telle couverture freine aussi son emploi. Il avoisine les 800€ par m² de couverture posée. La logique consumériste à court terme impose bien souvent le remplacement de ces superbes constructions. Bien que reconnues pour durer plus de cent ans, les laves laissent aujourd’hui place à des matériaux plus modernes et bien moins durables.